La kinésithérapie a pour but de maintenir ou de rétablir la gestuelle normale du corps humain, sa "mécanique". Elle est particulièrement importante dans l'ataxie télangiectasie afin de lutter contre la rigidité, l'amyotrophie et les troubles de coordination qui s'installent progressivement avec la neurodégénérescence et l'amplifie.
Kiné respiratoire
On peut s'étonner de trouver la kinésithérapie au niveau de l'appareil respiratoire et la kinesithérapie respiratoire dans l'éventail des soins aux patients AT. Mais en considérant d'une part, que les infections respiratoires sont fréquentes chez les AT et d'autre part, que l'expectoration et la respiration sont des phénomènes mécaniques, alors la kinésithérapie y trouve toute sa place.
Le premier intérêt est curatif : le but est de décoller les sécrétions des parois des voies respiratoires et de les évacuer. Mais après l'infection, il est également intéressant de maintenir la capacité pulmonaire et, en cas de séquelles, de réaliser des manoeuvres respiratoires d'entretien. Le kiné utilise pour cela différentes techniques:
- Le clapping (série de contraintes fortes appliquées sur la poitrine avec le creux de la main). Cette technique a été abandonnée au profit d'autres plus probantes.
- Une toux assistée et provoquée. À noter ici que la manoeuvre est un peu désagréable, consistant à comprimer la trachée pour provoquer la toux. Elle ne se justifie que sur les très jeunes enfants qui ne peuvent pas tousser à la demande.
- Des vibrations, de préférence manuelles, pratiquées par le MK , sur le temps expiratoire.
- Des respirations amples, actives dès que l'enfant est en âge de souffler seul. Ces inspirations-expirations actives peuvent se faire facilement sous forme de JEUX:
- Faire bouger dans l'air (ou l'espace) une feuille légère le plus longtemps possible
- Faire des bulles dans un verre d'eau à l'aide d'une paille (on peut motiver l'enfant en comptant les secondes à haute voix, il essaiera ainsi de "battre" son record -10 à 15 secondes est un bon score pour un enfant de 3 à 5 ans)
- Faire vaciller la flamme d'une bougie sans l'éteindre. Cet exercice permet d'apprendre à maîtriser à la fois la puissance de l'expiration,sa régularité ainsi que la direction du souffle, ce qui a l'avantage de faire travailler les muscles de la face en complément des muscles thoraciques respiratoires.
- Enfin, à la fin d'une séance, demander à l'enfant des expirations fortes et courtes (éteindre la bougie que l'on peut éloigner de plus en plus, déplacer le plus loin possible une petite balle en mousse sur un plan...etc)
La plupart de ces techniques sont indolores mais impressionnent généralement les jeunes enfants qui vivent mal la kinésithérapie respiratoire. À partir du moment où ceux-ci peuvent tousser spontanément, il est important psychologiquement de privilégier le côté ludique en les faisant participer activement.
Pour éviter les vomissements, il vaut mieux que les séances se déroulent soit avant le repas, soit après la digestion. De plus, il est impératif de faire cracher les sécrétions qui se dégageraient spontanément : en plus de contenir les agents pathogènes à l'origine de l'infection respiratoire, elles peuvent s'accumuler dans l'estomac et favoriser justement ces vomissements.
Le rire est aussi une excellente manoeuvre pour dégager les poumons. S'il ne permet pas un travail en profondeur, il constitue un excellent exercice préparatoire pour la séance de kiné qu'il rendra plus courte. Alors faites rire vos enfants !
Enfin, pour passer une bonne journée ou une bonne nuit, il est intéressant de pouvoir placer ces séances soit le matin tôt, soit le soir avant de se coucher.
Maintien de la mobilité
Il y a deux aspects dans la dégénérescence neuromotrice de l'ataxie télangiectasie:
- Une part purement neurologique, c'est-à-dire l'atteinte du système nerveux central (cervelet, ganglion basal, tronc cérébral) puis plus tard, l'atteinte des nerfs périphériques.
- Une part motrice qui tend à perturber le tonus musculaire dans le sens de la rigidité ou de la faiblesse et l'élasticité des tendons et ligaments, pouvant entraîner des déformations très handicapantes, notamment aux pieds et chevilles.
C'est sur ce deuxième aspect que va porter essentiellement le travail du kinésithérapeute. C'est le professionnel qui va connaître parfaitement l'état physique de son patient AT. Outre la nécessité de l'évaluer régulièrement en relation avec l'ergothérapeute et le psychomotricien, son action devra porter sur le maintien des capacités plutôt que sur la correction d'un défaut qui, s'il est installé, sera pratiquement impossible à récupérer dans le cadre de cette maladie neurologique. C'est la raison pour laquelle le partenariat avec le kinésithérapeute doit s'installer très tôt.
Sur le premier volet, le kinésithérapeute essaiera autant que faire se peut d'entretenir les compétences analytiques et fonctionnelles sur les commandes motrices, les équilibres et la coordination dans les principales fonctions motrices (AVQ).
Dans le cadre du maintien des attitudes, le travail devra particulièrement s'opérer sur :
- La détection des déformations
- Le contrôle et le maintien du tonus musculaire: par exemple, il est généralement assez faible au niveau des hanches et des genoux à l'inverse des pieds et des chevilles où il est trop fort.
- Le maintien de la souplesse: par exemple, une rétraction progressive des tendons et ligaments tend à limiter l'amplitude des mouvements jusqu'à conduire à une rigidité musculaire progressive, comme des varus équins (fait que les pieds et les chevilles rentrent progressivement vers l'intérieur et se crispent de manière irrémédiable). Parfois, la station debout et la marche ne sont plus possibles. La seule manière de les récupérer partiellement est alors la chirurgie : le chirurgien orthopédiste va « souder » de manière définitive la cheville pour que le pied soit à l'équerre ou proposer un geste d'allongement musculo-tendineux. La personne peut alors retrouver en partie son autonomie.
- Le maintien de la stabilité par la recherche de positions appropriées: pour jouer au sol par exemple, éviter la position assise en W de ? contraignante et privilégier la position en tailleur, permettent de mieux équilibrer le corps et d'utiliser ses bras avec plus de précision. Il n'y a pas a priori de risques de déformations dues à ces positions.
- Le maintien de la mobilité : lorsque le travail des trois items précédents ne suffit plus à maintenir la stabilité dans le déplacement, l'utilisation de matériel d'aide aux déplacements, voire d'un fauteuil roulant devient indispensable. Le rôle du kinésithérapeute sera alors de permettre au patient de maintenir son autonomie en travaillant avec lui les transferts par exemple.
- La prise en compte de la fatigue
Utilisation de matériel adapté
C'est le kinésithérapeute qui va juger du moment où le patient va avoir besoin d'un matériel d'aide pour ses déplacements. Il le dirigera alors vers un médecin de médecine physique et un orthopédiste et/ou un podologue. Il faut cependant garder en tête que le but d'utilisation d'un matériel n'est pas de corriger mais bien de faire de la prévention et d'augmenter le confort du patient. En effet, une fois l'anomalie installée, il est rarement possible de la rattraper et vouloir le faire à tout prix reviendrait à faire souffrir la personne.
Quand l'indépendance a disparu, le rôle du kinésithérapeuthe va être d'enseigner les méthodes de transfert au patient et à sa famille et de maintenir pour le patient la faculté de porter son propre poids pour les faciliter.